Considéré comme un instrument de lutte contre les discriminations à l’embauche, le curriculum vitae (CV) anonyme suscite de nombreuses réflexions en Europe, même si son utilisation reste peu répandue et que les résultats des expérimentations sont peu concluants.
C’est ce que révèle un rapport du service des études juridiques du Sénat, rendu public le 3 décembre 2009, qui compare les règles en vigueur sur le CV anonyme dans sept pays européens : Allemagne, Belgique, Espagne, Grande-Bretagne, Pays-Bas, Suisse et Suède.
Alors qu’en France, une expérimentation nationale du CV anonyme a été lancée le 3 novembre 2009 dans sept départements pour évaluer son efficacité dans la prévention des discriminations à l’embauche, de nombreux pays européens mènent des réflexions parallèles sur cet outil. C’est notamment le cas en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas, en Suède et en Suisse. En Allemagne et en Espagne, la question ne fait l’objet d’aucune attention particulière.
En Grande-Bretagne, le parti des démocrates libéraux a déposé un amendement tendant à obliger les employeurs à utiliser le CV anonyme dans le cadre de la future loi sur l’égalité. Une première fois retiré, cet amendement pourrait retrouver sa place au sein du texte de loi. Se basant sur les résultats d’un testing prouvant l’existence de discriminations à l’embauche, le gouvernement n’exclut pas de modifier son projet de loi pour y introduire des dispositions sur le CV anonyme.
Aux Pays-Bas, en Suède et en Suisse, des expériences de CV anonymes ont été réalisées localement, mais leurs résultats n’ont pas été jugés assez probants pour que la législation soit modifiée. Ainsi, la loi suédoise sur la lutte contre les discriminations adoptée en juin 2008 n’a pas été modifiée, tout comme aux Pays-Bas, où le choix de recourir ou non au CV anonyme est laissé à l’employeur. De la même manière, le gouvernement fédéral suisse a annoncé début 2009 qu’une règle générale portant sur l’introduction du CV anonyme pour les recrutements de l’administration de la Confédération n’était pas nécessaire.
De son côté, la Belgique se démarque un peu des autres pays en utilisant le CV anonyme dans l’administration depuis 2005. Même s’il ne constitue pas une obligation pour les employeurs du secteur privé, le CV anonyme est en revanche utilisé dans l’administration fédérale, d’une part pour les recrutements des personnels contractuels, et d’autre part pour la mobilité interne des fonctionnaires.
Cette procédure a été officialisée par un arrêté royal. Cet arrêté prévoit que les services publics qui souhaitent recruter des personnels contractuels ont l’obligation de consulter une banque de données de CV en ligne mise à leur disposition par le Bureau de sélection de l’administration fédérale (Selor). Cette banque de données inclut les fonctionnaires intéressés par des postes susceptibles d’être pourvus par des personnels contractuels. Lors de cette consultation, les données accessibles sont anonymes. Selor ne transmet les coordonnées des candidats correspondant aux CV sélectionnés que lorsque le service intéressé lui fait part de son intention de les convoquer à des entretiens.